Voilà Ophélie est
morte! Est-ce vrai? Comment le saurais-je? Il faudrait
que je retourne sur les lieux de mes ancêtres, sur les
lieux où tout se déroula, que j'aille dans la maison où
les bougainvilliers dormaient à l'ombre du patio et que
je réclame sa présence à nouveau pour savoir si elle est
toujours là.
Mais je ne le
ferais pas. Je ne connais pas si c'est vrai qu'elle est
partie. Comment est-il possible que cela puisse arriver?
La mort n'existe pas. Elle ne peut pas, même avec ses
pas feutrés, dérober ce qui ne lui appartient pas.
Ophélie, avec ses cent ans, n'est pas morte. Même si
tous s'obstinent à dire le contraire elle demeure en
moi.
Je la vois encore assise sur sa chaise à bascule,
avec son éventail, après le coucher du soleil, sur le
pas de sa porte, dessous les bougainvilliers sur un
tapis de ses fleurs par terre, son sourire aux lèvres et
cette chose ineffable qui communiquent ceux qui croient.
On peut croire ou n'est pas croire dans la vie, ni l'un
ni l'autre n'est certes ni vérifiable ni le contraire
mais, ceux qui croient ont, dans leurs yeux, dans
l'éclat de leurs pupilles, une lueur qui n'ont pas les
autres. La lueur de la foi est une grâce, comme ce l'est
la beauté, sans preuve ni explications. Ophélie a cet
éclair indéfinissable dans ses yeux.
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